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Plus de 40% des français vivent avec un smartphone dysfonctionnel, majoritairement pour des raisons d’obsolescence logicielle
Communiqué de presse
L’étude a été menée par Limites Numériques , un projet de recherche porté par le CNRS , Université Claude Bernard Lyon 1 , Université de Strasbourg , et en collaboration avec Télécom Paris et Université de Toulouse . Sondage mené par Médiamétrie en 2023 sur un panel de 1000 personnes représentatives de la population française.
Informations clés
- En 2023, 42% des français vivaient avec un smartphone dysfonctionnel.
- Les applications et logiciels sont responsables de 60% des dysfonctionnements rencontrés sur les smartphones.
- Parmi tous ces problèmes matériels et logiciels, les plus fréquents sont la batterie usée (28%), le stockage saturé (23%), la lenteur (21%).
- Les problèmes arrivent tôt : la moitié dans l’année de l’obtention du smartphone, un quart durant la deuxième année.
- Les personnes cohabitent pendant longtemps avec des problèmes en majorité plutôt ou très gênants. Malgré la gêne, seulement 1 tiers sont résolus, et un autre tiers sont encore présents sur le smartphone plus de 2 ans après leur apparition.
- Le remplacement est le plus souvent dû à une dégradation progressive de l’appareil, plutôt qu’une casse arrivant d’un seul coup.
Cadre de l’étude
L’empreinte carbone des terminaux est due en majorité à leur fabrication (78%, ADEME-Arcep, 2023), il est donc important de prolonger leur durée de vie. Dans cette étude, Limites Numériques s’intéresse en particulier aux smartphones, qui ont une durée de vie faible : on les remplace en moyenne tous les 2 ans et demi en France (Arcep, 2021).
Une première étude qualitative (Mosesso et al., 2023) conteste l’idée qu’un smartphone s’arrête de fonctionner d’un coup à cause d’un problème unique. Au contraire, le renouvellement des smartphones est dû à une accumulation de problèmes matériels et logiciels qui dégradent progressivement l’appareil.
Faciliter la réparation matérielle ne suffit donc pas pour prolonger leur durée de vie, il faut également prendre en compte l’obsolescence logicielle. Si ce terme désigne souvent les problèmes de mises à jour ( Rapport sur l’obsolescence logicielle , 2021), l’étude suggère de l’élargir en prenant en compte la saturation du stockage, la lenteur et les bugs qui joueraient également un rôle important dans le renouvellement des smartphones.
L’objectif de cette seconde étude a été de compléter ces premiers éléments avec des données récoltées sur 1000 personnes représentatives de la population française, pour mieux comprendre :
- Combien de personnes vivent avec un smartphone cassé ou dysfonctionnel ?
- Quels sont les problèmes rencontrés ?
- Pourquoi et comment les personnes cohabitent-elles avec ces problèmes ?
- Dans quelle mesure influencent-ils le renouvellement ?
Résultats
Une majorité de problèmes logiciels :
Les résultats de l’étude montrent que 42% des personnes ont des problèmes de fonctionnement avec leur smartphone actuel, pour des appareils de moins de 3 ans en grande majorité. Le problème le plus fréquent est la batterie dégradée (rencontré par 28% des personnes), suivi de la saturation de stockage (23%) et de la lenteur (21%). Les problèmes de mises à jour sont quant à eux rencontrés par 12% des personnes. Les problèmes apparaissent rapidement : la moitié dans l’année d’obtention du smartphone, un quart durant la deuxième année.
Alors que l’accent est souvent mis sur les problèmes matériels : batterie défaillante, écran cassé (Arcep, 2021), notre étude met en évidence que la majorité des problèmes rencontrés sont logiciels. L’obsolescence logicielle joue donc un rôle important dans la dégradation des smartphones. Les problèmes matériels, c’est-à-dire que l’on peut résoudre par la maintenance, la réparation ou le remplacement d’un composant (batterie, écran…), représentent 40% des problèmes rencontrés. Le reste des problèmes (60%) sont liés au logiciel : mises à jour, mais aussi stockage saturé[1], bugs et lenteur, fonctionnalités qui ne marchent plus…


Peu de problèmes résolus malgré la gêne :
De manière générale, les personnes cohabitent pendant longtemps avec des problèmes qui les gênent. Les problèmes durent souvent plus de 6 mois (68%), voire plus de 2 ans (36%), même s’ils sont considérés comme plutôt gênants (47%) ou très gênants (35%). On note aussi que les niveaux de gêne des problèmes matériels et logiciels sont similaires.
De plus, la résolution est difficile : les personnes interrogées ont tenté de résoudre seulement 43% des problèmes, et plus de la moitié (58%) des tentatives de résolution échouent. Au total, seulement 1 tiers des problèmes sont résolus. Parmi les personnes qui n’ont pas résolu leurs problèmes, beaucoup gardent leur téléphone dysfonctionnel parce qu’elles veulent le faire durer le plus longtemps possible, et parce que le réparer ou le remplacer coûterait trop cher.
Enfin, au moment où le téléphone précédent a été remplacé, il était complètement inutilisable dans seulement 14,7% des cas. Le remplacement d’un smartphone est ainsi plus souvent motivé par la frustration liée à l’accumulation de dysfonctionnements matériels et logiciels sur l’appareil que par une réelle incapacité d’utilisation.
Implications
Cette étude appelle donc à faciliter la réparation matérielle, mais aussi la résolution des problèmes logiciels en prenant en compte non seulement les mises à jour, mais également la saturation de stockage et la lenteur des terminaux.
Elle permet d’identifier plusieurs leviers d’action, en particulier à destination des concepteurs, développeurs, designers de services numériques :
- Mettre en place une garantie logicielle de la part des fabricants de smartphones, et ce sur plusieurs années.
- Mettre à disposition des applications plus légères et moins consommatrices de données pour ne pas saturer le stockage, compatibles avec des faibles capacités de calcul pour éviter la lenteur et préserver la batterie.
- Faciliter la gestion du stockage, et rendre intelligible les données produites par les applications.
- Ajouter des paramètres qui permettent de contourner les dysfonctionnements et de préserver la batterie.
- Faciliter la réparation et la maintenance matérielles et logicielles : étendre le bonus réparation à la résolution de problèmes logiciels, concevoir des équipements et logiciels que l’on puisse réparer et maintenir soi-même.
Pour plus de détails sur les résultats du sondage : https://limitesnumeriques.fr/travaux-productions/sondage-obsolescence-smartphones
[1] Nous considérons la saturation de stockage non pas comme un problème matériel (car le stockage n’est pas défaillant ou cassé) mais comme un problème logiciel due à une non-optimisation des logiciels, ou à la difficile gestion des données (tri, suppression) via l’interface du smartphone.
Pour les questions presse, nous contacter à limites[at]services[.]cnrs[.]fr